C’est la rentrée du blog ! Et je reviens avec un article que j’ai longtemps repoussé, parce qu’il n’est pas facile à mettre en mots. Au programme : auto-sabotage, syndrome de l’imposteur et manque de confiance en soi. Autant de noms pour un même problème, dont je suis très, très largement atteinte.
[Cet article était déprimant, il est accompagné des images douces et remplies de self-care de The Latest Kate. Allez voir ce qu’elle fait !]
Confiance en quoi ?
Je n’ai pas confiance en moi. Je n’ai jamais eu confiance en moi. Que ce soit pour mes études, pour mon travail… et maintenant pour l’écriture. Il y a toujours cette petite voix dans un coin de ma tête, celle qui cherche toujours à me rabaisser et à me faire douter de moi et ce que je fais.
Tu crois faire quoi, à jouer les autrices ? Tu penses vraiment que ce que tu écris peut intéresser des gens ? Des éditeurs ? Des lecteurs ? Ouvre les yeux, les gens se rendront bien compte que tu écris de la merde.
Ça, ce sont les idées générales. Ce sont les plus simples à repousser. J’ai des chouettes primo-lectrices, des gens qui me disent qu’ils aiment ce que je fais, des éditeurs qui ont choisi quelques-unes de mes nouvelles pour des anthologies… Tenez, vous savez la première chose que je me suis dite, quand j’ai reçu mon premier « oui » pour une nouvelle ? « Merde, ils n’ont pas dû recevoir beaucoup de textes. » Sauf qu’en fait, si. Et ils m’ont pris quand même. Bref, j’ai des choses à quoi me raccrocher. Donc, KO la petite voix ? Si seulement…
Ouais, tu parles, c’était juste un coup de chance. Ça fait combien de temps que tu n’as pas placé une nouvelle ? Tu n’avances pas. Regarde les autres, elles ont/vont publier, et toi tu vas rester à la traîne.
La petite voix n’abandonne pas si facilement. Et en plus, elle aime les coups bas. Jouer sur la jalousie, par exemple, sur l’envie face aux succès des autres. Parce que même si ce sont des amies très chères et que je suis folle de joie pour elles, il y a quand même cette pointe de jalousie qui est là. Et c’est mal, et c’est injuste, et je le sais, mais c’est là quand même. Et la petite voix adore ça.
Contrairement à toi, elles, elles ont du talent. Reviens sur terre !
Alors on l’ignore. On s’accroche aux nouvelles qui ont plu. On s’accroche au roman à 4 mains qu’on va publier, bordel, on a même signé le contrat, c’est réel ! Mais ce n’est pas suffisant. Parce que la petite voix, elle, est pleine de ressources.
Ils vont s’en rendre compte, tu sais ? Que tu es un imposteur. Que tu n’as pas d’idées originales. Que tu passes ton temps à bloquer sur tes textes, et que ce sont les autres qui te débloquent, à chaque fois ? Que ce sont leurs idées, pas les tiennes. Si tu avais écrit Spirite seule, tu crois vraiment qu’il aurait pu être publié ? Arrête de rêver, ma pauvre.
Alors on trouve encore une autre parade, et une autre, et une autre. C’est normal de ne pas être original, c’est normal de brainstormer à plusieurs, j’ai travaillé autant que Louve sur Spirite, les idées viennent de vous deux… Sauf que ça ne finit jamais. La petite voix est toujours là, à me murmurer que je ne vaux rien — que mes textes ne valent rien. Et c’est usant. Et contre-productif. Parce qu’il y a ces textes qui dorment sur mon disque dur, ces nouvelles finies, recalées pour un AT et retravaillées, que je dois envoyer en AT libre depuis… 1 an ? 2 ans ? Et je n’ose pas. Parce que…
Qui voudrait lire ce truc ? Ouais, c’est pas mal écrit, mais de là a plaire, il y a un gouffre…
Alors on envoie pas. Et on déprime un peu plus à chaque AT négatif, même si on sait qu’un refus ne veut pas dire qu’un texte est nul, qu’il y a plein d’autres raisons possibles. On le sait… mais ça change rien.
Tu es nulle.
Et le pire ? Je sais ce qu’il se passe. Je sais que ce n’est pas logique, pas rationnel, que c’est une barrière que je dois dépasser. Je sais que je ne suis pas seule (loin, très loin de là. Merde, même les plus grands auteurs y passent aussi).
Tu n’es pas sérieusement en train de te comparer aux grands auteurs, quand même ? Eux peuvent avoir des circonstances atténuantes, le fait d’en vivre, l’attente qui va avec leur nom… Et toi ? Ah, oui, rien, c’est vrai.
Je sais ce qui se passe. Assez pour le reconnaître chez les autres, et osciller entre le bottage de cul et les encouragements et les cœurs et « bien sûr qu’on aime ce que tu écris » et « non, ce n’est pas nul ce que tu fais, promis » et « bon, tu envoies, oui ou merde ? ». Parce qu’il y a autre chose que je sais. C’est que la petite voix a tort, toujours, tout le temps. Et qu’il ne faut pas l’écouter.
Je le sais. Merde, j’ai poussé le vice à faire des recherches dessus. Pour mettre un nom dessus, pour comprendre les mécanismes, pour analyser mes réactions…. Je sais ce qu’il se passe.
Tu te crois plus douée et plus intelligente que tout le monde, tu regardes tout le monde de haut, mais tu n’es rien. Et tout le monde finira par s’en rendre compte.
Sauf que ça ne change rien.
Et c’est usant.
Mais si vous me lisez, et que vous aussi, vous entendez ce genre de petites voix… Ne l’écoutez pas. Elle a tort. Oh, elle est bruyante, méchante, jamais à court de nouvelles idées pour vous rabaisser et vous freiner. Mais elle a tort. Vous êtes légitime, et ce que vous produisez l’est aussi.
[Initialement, cet article devait traiter des causes du syndrome de
l’imposteur et de comment y faire face. Mais il est sorti comme ça, et en fin de
compte, une démonstration d’à quoi ça ressemble, ce n’est peut-être pas si mal.
Le vrai sera pour la prochaine fois. (Et oui, la petite voix m’a aussi dit que
cet article ne servait à rien, et ce que ce n’était qu’un ramassis
d’égocentrisme, tout comme le reste du blog. Et j’ai failli l’écouter avant
qu’on me convainque que non.)]