Je crois que je ne l’apprends à personne, mais nous vivons un drôle de moment. La pandémie nous oblige à nous confiner, parfois dans des conditions confortables, parfois non. Et bien sûr, il y a le reste : promiscuité, stress, maladie, décès, chômage partiel, pertes de revenus, travail dans des conditions sanitaires imparfaites, enfants à éduquer et occuper, personnes vulnérables dont s’inquiéter… Qu’on le ressente ou pas, la situation actuelle est pesante, voire angoissante, pour un certain nombre (beaucoup ?) de gens.
Ce qui n’empêche pas les discours productivistes de fleurir. On est confinés et arrêtés (ce qui n’est d’ailleurs pas vrai pour tout le monde), alors il faut lire, il faut écrire, il faut peindre, il faut faire du qi gong et de l’origami, il faut faire 3 gâteaux et 5 plats avec des épices exotiques par jour…
Sauf que.
Sauf que non, en fait. Pour écrire, pour créer, pour peindre, il faut en avoir la motivation et l’énergie. Deux denrées rares dans les circonstances actuelles (ou dans n’importe quelle autre période stressante, pour quelque raison que ce soit). Quand on s’angoisse pour le présent ou le futur, il est parfois difficile de se libérer assez d’espace mental pour juste ne plus avoir l’impression d’être un hamster dans sa roue. Alors, créer peut devenir dur. Et c’est normal, et surtout ce n’est rien dont on doit avoir honte.
Bien sûr, tout le monde n’est pas comme ça. Certaines personnes vont pouvoir créer même dans des conditions stressantes, et ne vont pas voir le lien entre état psychique et création. C’est mon cas, par exemple. Il est très rare que je me sente mal au point de ne rien pouvoir écrire, et quand ça arrive ça dure 3 ou 4 jours max (souvent une soirée). Le stress, la fatigue, la tristesse… n’ont jamais eu ce genre d’impact sur moi. Et pendant longtemps, j’ai eu du mal à comprendre que mon cas était très loin d’être une généralité. Et que pour la plupart des gens, aller mal était un véritable frein. J’ai fini par tilter, quand même. Mieux vaut tard que jamais.
Du coup, en pratique ?
La situation actuelle (ou toute autre situation pesante, une fois encore) est trop pesante, et a tari la source créative ?
Ce n’est pas grave. C’est normal. Il n’y a pas à en avoir honte, et votre valeur n’est pas corrélée à votre production (ou non-production). Lisez, faites un peu de pâtisserie, faites des picross sur le net pendant des heures, scrollez les réseaux sociaux, allez faire un tour dehors (… à réserver pour les situations qui ne sont pas le confinement, of course), chantez « Libérée, Délivrée » à la fenêtre, comptez les oiseaux, faites de la couture… Bref, trouvez ce qui vous fait du bien, le temps que les choses s’améliorent.
Le stress ne vous empêche pas de créer ?
Tant mieux ! Profitez-en, amusez-vous et inondez-nous d’art.
Et surtout, soutenez vos connaissances qui n’ont pas cette chance et s’en veulent de ne rien réussir à faire.